Mise a niveau poussee pour le pantserhouwitser neerlandais
Comment resister a l’usure du temps: optimisation de l’artillerie via un Midlife update
Ageing assets. Une notion faisant parler d’elle dans le monde de la maintenance. Et à raison. Car même si vous parvenez à discerner correctement le vieillissement d’une installation, comment soumettre ce système à une cure de jouvence, d’une manière permettant de garantir la sécurité continue? Ce point délicat est bien d’actualité aussi au sein de la défense. Les Pantserhouwitsers des forces armées néerlandaises par exemple, opérationnels depuis 2006 (mais également remisés près de 10 ans), n’atteindront l’âge de la retraite qu’à partir de la moitié des années 2030. Afin de garantir la continuité opérationnelle jusque là et d’optimiser le fonctionnement, une revalorisation technologique s’imposait. Elle prendra dès l’an prochain la forme d’un Midlife Update, soit le ‘reconditionnement’ des Pantserhouwitsers avec de nouveaux logiciels et hardware.
Le Pantserhouwitser 2000NL (PzH2000NL)
- Longueur: 11,70 mètres (avec canon)
- Hauteur: 3,07 mètres (3,46 mètres avec mitrailleur de toit de tour et périscope)
- Poids: 55,5 tonnes (prêt au combat)
- Moteur: moteur diesel 8 cylindres, 986 Ch
- Equipage: 5 personnes
- Vitesse: 62 km/h
- Armement: obusier 155 mm (tir courbe); mitrailleur de toit de tour 7,62 mm; lance-grenades (de fumée)
Remisage & (re)introduction
Economies pendant les années de crise
Le Pantserhouwitser 2000NL de 55 tonnes a été introduit en 2006 en vue de remplacer l’obusier M109 (version A2/90) auprès de l’armée de terre néerlandaise. Cet impressionnant engin est capable de tirer des obus de 155 mm (43,5 kg) bien au-delà de la ligne de front (plus de 30 km) en tir courbe (tir indirect) sur des cibles sélectionnées avec précision. En utilisant des munitions spéciales, comme le projectile de précision de haute technologie guidé par GPS Excalibur, la portée peut même atteindre 50 km, voire plus. Malgré ces atouts de taille, non moins de 29 exemplaires flambant neufs ont – avec la crise économique et l’optimisme concernant la sécurité en Europe occidentale comme principaux catalyseurs – été remis en vitrine quasiment directement après leur achat, avec 115 chars de combat Leopard, 500 véhicules blindés YPR, 15 F-16, 8 hélicoptères Cougar, 2 Fokker 50 et 4 chasseurs de mines.
Danger de l’immobilité
Depuis quelque temps, la situation a toutefois complètement changé. Les années de crise sont entre-temps oubliées depuis un moment, tandis que des analyses de la sécurité récentes révèlent qu’après des années de compression, la capacité de la Défense néerlandaise est aujourd’hui aussi à nouveau en pleine expansion. L’attention s’est ainsi à nouveau portée sur les Pantserhouwitsers. Heureusement, il n’y avait pas eu d’acheteurs pour les exemplaires en vente. Les obusiers ‘plus anciens’ pouvaient donc en théorie être directement intégrés dans la 41e Section Artillerie créée récemment.
“Les années d’immobilité n’ont toutefois pas fait de bien aux Pantserhouwitsers”, explique le Major Dennis, Chef Adjoint ‘Plans’ au sein de VustCo (Vuursteun Commando).
“Après plus de 10 ans de remisage, les réservoirs à carburant ne seront ainsi peut-être plus parfaitement étanches. C’est pourquoi ODB (n.d.l.r: entretien, diagnostic et remisage) contrôle minutieusement les systèmes avant qu’ils puissent à nouveau être ajoutés à la Batterie. Et afin d’éviter la perte de temps, d’efforts et de moyens, nous anticipons aussi le Midlife Update prochain, débutant à partir de 2020.”
Midlife Update (MLU)
Le Pantserhouwitser 2000NL est comme nous l’avons dit déjà opérationnel – avec certes une coupure de quelques années – depuis 2006 auprès du Commandement Forces de Terre, en guise d’appui-feu pour renforcer et soutenir les unités de manœuvre. En vue de pouvoir anticiper la fin théorique de la durée de vie des Pantserhouwitsers (2035-2039) sans compromettre la continuité opérationnelle supposée, une option consistait d’une part en un remplacement accéléré, ce qui reviendrait toutefois nettement plus cher.
Mais il y avait d’autre part aussi la possibilité de procéder à une mise à niveau technologique poussée des systèmes existants. Avec un coût estimé entre 25 et 100 millions d’euros – nettement moins que l’investissement dans un remplacement intégral, le choix s’est porté logiquement – vu le budget limité prévu – sur cette dernière option. Pour ce Midlife Update, ou MLU, les Pays-Bas collaboreront à partir de l’an prochain avec l’armée allemande, qui utilise aussi le Pantserhouwitser 2000, comme avec le fabricant Krauss-Maffei Wegmann (KMW). La mise à niveau englobe diverses mesures sur divers plans, afin de remédier ainsi à certains défauts techniques et opérationnels constatés.
1. Systèmes ICT
L’intervention peut-être bien la plus essentielle se situe au niveau ICT.
“La conception initiale du Pantserhouwitser date des années 80 et 90, avec l’électronique et les drivers qui étaient pour l’époque à la pointe de la technologie”, explique le Major Eddy du Kenniscentrum Vuursteun. “Les systèmes ICT à bord ont depuis lors certes été modernisés régulièrement mais il s’agissait en principe surtout de mises à niveau de la conception de base. C’est un peu comme un système d’exploitation comme Windows XP, qui a pu être utilisé des années grâce à des mises à jour et patchs réguliers. Un système peut ainsi rester performant de longues années mais lorsqu’une nouvelle génération plus sûre et plus puissante de systèmes est disponible avec Windows 10, il s’agit tout de même après un certain temps de passer au nouveau système, afin de permettre à l’installation d’intégrer les innovations futures. Il en va de même pour le Pantserhouwitser.”
2. communicatiON MODERNE
Dans un appareil de défense moderne, une communication infaillible est indispensable. Celle-ci repose notamment sur une structure de commandement militaire encerclant tous les actifs militaires, le Battlefield Management System. Ce système permet à des Joint Fire Cells (JFC, les centrales de commandement se trouvant souvent à une grande distance des actifs proprement dits) de coordonner ainsi l’appui-feu de terre et aérien; et les Fire Support Teams sur le terrain peuvent rester en contact non seulement avec les Pantserhouwitsers, mais aussi avec des avions ou même des navires pour indiquer où se trouvent les cibles visées. Après avoir ensuite tiré sur la cible, le Pantserhouwitser doit disparaître le plus vite possible du champ de vision de l’ennemi, afin d’échapper à un contre-feu (‘shoot and scoot’); et ce, sans que la communication avec le propre réseau soit perdue. Sur ce point aussi, le Midlife Update doit pouvoir à nouveau amener la gestion ICT de l’obusier à un niveau moderne.
3. Réduction des vibrations, de l’onde de choc et du bruit
Il va de soi qu’outre le volet logiciel, le hardware est aussi en constante évolution, avec des processeurs de plus en plus puissants à un rythme de plus en plus soutenu. Dans le cas d’applications comme celles au sein des forces armées, ce hardware doit – bien plus que pour une utilisation domestique – être capable de résister à des conditions environnementales difficiles. Avec notamment les vibrations générées quand on progresse à grande vitesse sur un terrain accidenté ou quand on décharge – parfois plusieurs fois de suite – un canon de 155 mm. Une attention particulière est aussi accordée à la charge sonore et à l’onde de choc (‘blast’) résultant du tir.
4. Ventilation
“Des températures extrêmes ou l’humidité ne doivent pas non plus avoir d’influence sur le fonctionnement de l’artillerie”, déclare le Major Dennis. “Que ce soit en Norvège, à ‘t Harde ou en Afghanistan, le Pantserhouwitser doit rester opérationnel.”
Lors de l’utilisation en Afghanistan, il s’est toutefois avéré que l’obusier n’était pas prévu pour les températures extrêmes de là-bas, ce qui avait non seulement des conséquences pour les conditions de travail de l’équipage, mais aussi pour l’efficacité de la poudre dans les cartouches (charge propulsive). En raison du risque accru d’interventions dans des environnements CBRN, avec un contact possible avec des substances chimiques, biologiques, radiologiques ou nucléaires dangereuses, l’optimisation de la ventilation, du refroidissement et du chauffage constitue aussi un élément crucial du Midlife Update des obusiers. Il n’y a, en effet, qu’ainsi que les artilleurs peuvent être protégés de tout contact CBRN.
5. Vision nocturne & blindage
Autre leçon tirée après des interventions en Afghanistan: il n’y avait pas là-bas de ligne de front claire distinguant clairement les deux parties. De ce fait, un Pantserhouwitser même peut aussi plus vite devenir la cible d’une attaque. Un blindage plus lourd mais également un équipement de vision nocturne amplificateur de clarté devant permettre de distinguer et de neutraliser des actifs indésirables même la nuit s’imposaient donc.
Regime de maintenance
Lorsque tous les PzH2000NL auront eu droit à leur MLU et réintégreront leurs unités, ils se retrouveront à nouveau sous le régime de maintenance normal. L’équipage effectue les réparations simples – remplacer une lampe, un tuyau ou un collier – lui-même. Si le problème est plus complexe et que la réparation s’annonce plus longue, le Sergent de Première Classe Werner et ses mécaniciens du groupe ODB de la 431 Compagnie de réparation se chargent du patient.
“Le MLU représente aussi pour nous une formation continue”, déclare-t-il. “Mais après le MLU aussi, nous tentons de résoudre un maximum de problèmes via la maintenance. En nous souciant du matériel même – p.ex. avec un bon paillasson (brosse) afin que des grains de sable risquant de compromettre le bon fonctionnement du système de chargement de munitions ne puissent pas entrer – mais aussi de l’environnement. Lors de travaux sur le moteur, on déplace ainsi les obusiers sur un sol revêtu, afin que du carburant, de l’huile ou autres substances ne puissent pas pénétrer dans le sol. Cela illustre la collaboration entre les services opérationnels et les spécialistes de la maintenance. Cela est non seulement essentiel, mais aussi intéressant”, conclut le Sergent, satisfait.