Du dieselgate à la tragédie de la batterie
RUBRIQUE – FERRE BEYENS, ANALYSTE/JOURNALISTE AUTOMOBILE
L’hystérie des activistes pour le climat interdit toute nuance et toute relativisation. La réalité est déformée, les chiffres manipulés et les faits délibérément dissimulés. Le mensonge règne, la vérité se meurt et l'aveuglement collectif s'intensifie. La mémoire nous trompe plus souvent qu'on ne le pense. Nous oublions tous les projets écologiques coûteux du passé, leurs réalisations décevantes, leur coût exubérant, leur impact désastreux sur l'économie et leurs résultats environnementaux et climatiques extrêmement médiocres au final. Et nous continuons à nous taire dès que des rêveurs écologistes nous proposent de nouveaux objectifs farfelus.
“Cette planète, peuplée de criminels du CO2, doit être complètement décarbonisée”
De nouveaux objectifs, aux coûts colossaux, voilà vers quoi nous allons. Cette planète, peuplée d’horribles criminels du CO2, doit être complètement ”décarbonisée” d'ici 2050. Le nouvel objectif est d’atteindre ”zéro émission de CO2” pour l'économie et les transports. En effet, le climat et l'environnement sont menacés. Et bien sûr, c'est surtout la voiture qui est visée. Le moteur à combustion interne (ICE) doit tirer sa révérence. Vive le moteur électrique (BEV).
Dans son aveuglement, l’humanité ne voit pas qu’il existe des tonnes d'études illustrant l'idiotie de cet objectif. Emissions Analytics a calculé que la propulsion hybride est plus efficace pour lutter contre le CO2 que le BEV. A capacité de batterie égale, les hybrides complets peuvent réduire le CO2 de 30% par rapport à un ICE. Les BEV émettent 0 g de CO2/km localement (réduction de 100%) mais à capacité de batterie égale, on peut construire 14 fois plus de voitures hybrides et les voitures partiellement électriques réduisent quatre fois plus le CO2.
Le débat climatique polarisé passe à côté des effets secondaires fâcheux du BEV. Il ne tient pas compte de l'augmentation d'autres gaz à effet de serre plus dangereux (que le CO2). Ni des émissions polluantes des BEV plus lourds qui provoquent une plus forte usure des pneus et des freins. Ni de l'énergie électrique que nous mettons dans les batteries et qui est loin d'être neutre en CO2. Ni de la faible efficacité énergétique des BEV. On oublie donc bien volontiers que l'idéologie du CO2 à laquelle on aspire avec les BEV a des effets secondaires pervers: détérioration de la qualité de l'air, formation de suie et de poussière, pollution par les microplastiques.
Le fait que les médias parlent de la neutralisation du CO2 avec jubiliation au lieu de poser les vraies questions est frustrant pour les chercheurs expérimentés qui formulent des critiques justifiées. Il suffit de voir l'étude récente et révélatrice d'Emissions Analytics, qui modélise l'effet sur le CO2 de l'électrification des voitures pour les BEV, les hybrides complets et les ICE. Le CO2 émis lors de la production d’ICE, d'hybrides complets et de BEV est respectivement de 5,8, 6,2 et 11,4 tonnes par unité. Les émissions moyennes de CO2 lors de l'utilisation sont de 111, 78 et 0 g/km. Une étude plus approfondie a été réalisée sur la base d'un kilométrage annuel de 16.000 km et d'une durée de vie du véhicule de 200.000 km. Avec la stratégie de liquidation définitive des ICE et le passage définitif aux BEV, la composition des ventes (de voitures neuves) pourrait être de 100 % de BEV en 2040 mais cela ne débouchera sur un parc 100% BEV que 10 ans plus tard (car la disparition des ICE existants se fera progressivement).
Avec cette stratégie BEV, les émissions cumulées de CO2 seront plus élevées pendant au moins une décennie. A cause des émissions de CO2 plus élevées liées à la production des BEV. Vers 2034, les émissions cumulées de CO2 d'un BEV devraient être inférieures à celles d'un ICE car les avantages d'une absence d'émissions pendant la conduite compenseraient la progressivité de la baisse des émissions lors de la fabrication. D'ici 2070, les émissions cumulées des BEV seront inférieures de 811 millions de tonnes, soit seulement 47% de moins qu'avec une stratégie durable pour les ICE. Pire encore ... si nous doublons la capacité moyenne des batteries par véhicule (pour compenser l'autonomie défavorable des BEV), les émissions de CO2 dues à la production de batteries augmenteront aussi. Les économies cumulées de CO2 des BEV ne seront donc que de 11 % en 2070. Compte tenu du potentiel des hybrides en matière de CO2, Emissions Analytics a également comparé une stratégie full hybride avec les chiffres des BEV. Si le parc automobile devait passer à des véhicules hybrides complets FHEV en 2050, les émissions cumulées de CO2 ne seraient que de 5% inférieures à celles des BEV ...
Les économies de CO2 cumulées décevantes pour les BEV sont dues aux émissions (actuellement) beaucoup plus élevées lors de la fabrication. Neutralité en CO2 lors de l'extraction et de la transformation des matières premières, lors de la production de batteries, lors de la logistique et lors du recyclage des matériaux rares pour l'électrification automobile… la quête de cette neutralité en CO2 va déjà au-delà de la conduite de BEV ‘neutres en CO2’ dans le centre-ville.
Si l'on ne permet plus l'émission de CO2 en 2050, il est encore plus important, d'un point de vue du ”changement climatique”, de calculer maintenant ce à quoi l'humanité devra faire face dans les vingt prochaines années et dans la quête de cette neutralisation du CO2. Un suivi plus solide et plus transparent de la réduction cumulée de CO2 effectivement mesurable sera alors indispensable. Sinon, il y aura inévitablement une tragédie du BEV dans dix ans. Nous constaterons alors qu'une grande partie de la réduction de CO2 prévue aujourd'hui est une illusion; que la qualité de l'air ne s'est pas du tout améliorée. Il est donc impossible de le formuler mieux que Emissions Analytics. Il a fallu 15 ans pour que l'introduction de la réduction de NOx et que la désastreuse réglementation européenne en la matière ne génèrent un ‘dieselgate’. Dans le cas des BEV, les faibles résultats attendus en matière d'environnement et de climat risquent de faire échouer ce dogme de la neutralité en CO2. Et une fois de plus, l'humanité aveugle sera confrontée à un immense gaspillage de budgets colossaux.